LES LAVOIRS ET L'EAU

L'ALIMENTATION EN EAU

Puits rue d'Omont
Puits rue d'Omont

 

 

L’alimentation en eau du village est initialement assurée par des puits : très profonds à la Haute-Chagny de 20 à 25m, alors que dans le bas de village, on peut puiser l’eau à même le puits sans chaîne, ni treuil.

 

LES LAVOIRS

Une fontaine lavandière en pierre existait déjà en 1810. En 1824, on projette de construire différents lavoirs, bacs et abreuvoirs pour les animaux en récupérant des sources perdues.

 

En 1854, Chagny compte 4 fontaines et lavoirs : à la Haute-Chagny (« Marleboeu »), plus bas au « Sauvy », vers Omont (« Béthemay ») et au cœur du village « La Grande Fontaine ».

 

La Grande Fontaine

 

La Grande Fontaine, lavoir en pierre, à impluvium permettant un éclairage du bassin.

 

Ce lavoir a été restauré en 2016, en même temps que l’église, lors d’un chantier d’insertion. Les travaux ont été financés par la Communauté de Communes des Crêtes Préardennaises, la commune, des donateurs et la Fondation du Patrimoine.

 

 

Une particularité de ce lavoir : on peut accéder à la source de l’extérieur comme de l’intérieur du lavoir.

La fontaine du Sauvy

Le captage de la source alimentant ce lavoir est recouvert de pierres formant une voûte. Cette fontaine est intégrée maintenant à une pâture suite au remembrement. Elle ne figure pas sur le cadastre de 1834.

Autrefois une ruelle entre deux maisons situées vers le haut de la Grande Rue amenait directement les lavandières à ce lieu. Elles étaient protégées des intempéries, le lavoir ayant un toit et des parois en bois. L’eau servait à « couper la goutte » : à la distillation, l’eau de vie sort de l’alambic à 90°, on ajoute de l’eau pour abaisser son degré d’alcool.

Le lavoir de Béthemay

 

 

Ce lavoir est situé à la sortie du village en allant vers Omont. Il est aussi à impluvium. Ses parois sont constituées d'un bardage en aulne.

Jour de lessive

La règle de trois : tous les trois mois, pendant trois jours ! (d'après Chagny, Traces du passé - Anne-Marie Henry - 1956)

Premier jour

On prend des femmes de lessive : la mère Gérard (décédée en 1910) et Maria Bertrand. On empile le linge dans les hottes et on va mouiller à la fontaine de Mare de Bœuf.

Cadastre de 1834 - Archives départementales des Ardennes
Cadastre de 1834 - Archives départementales des Ardennes

En venant de la Haute-Chagny, la ruelle du Mar de Boeuf conduit à la fontaine. Il faut suivre un étroit sentier bordé de hauts talus surmontés de grandes haies.

Extrait Carte d'Etat-Major (1820-1860) - IGN
Extrait Carte d'Etat-Major (1820-1860) - IGN

La fontaine se trouve dans une combe de verdure. Une abondante source qui sort au pied d'un haut talus l'alimente.

Elle emplit également deux grands bacs qui servent d'abreuvoir aux bestiaux et qui remplacent l'ancienne mare. Le trop plein des bacs s'écoule au hasard.

 

 

 

Le site de cette fontaine est vraisemblablement matérialisé sur cette carte par les deux mares successives à gauche sur la photo.

Difficile d'accéder à ce lieu pour les lavandières : l'abord des abreuvoirs est piétiné par les bestiaux donnant une épaisse couche de boue. On y a remédié en posant de place en place d'énormes pierres. Les laveuses se munissent de longs bâtons et font des prodiges d'équilibre sautant de pierre en pierre pour gagner la fontaine.

L'hiver, on leur envoie un enfant porteur d'une petite bouteille remplie de vin chaud sucré.

Deuxième jour

On coulait la lessive.

Le grand cuveau est remonté de la cave et placé sur un immense trépied à proximité de la chaudière où d'ordinaire cuit la pâtée des cochons qu'à Chagny on appelle la caboulée. La chaudière est nettoyée, remplie d'eau que l'on chauffe. Le linge est empilé dans le cuveau.

Par-dessus, on jette un drap empli de cendres de bois gardées, choisies et triées pour la circonstance. Alors commence le coulage. Avec une petite casserole, une des laveuses verse l'eau chaude sur la cendre. Le linge s'en imprègne et l'eau ainsi chargée de potasse s'en va dissolvant les matières grasses. Elle traverse l'épaisseur toute entière et s'en va couler au bas du cuveau par une petite ouverture où la deuxième laveuse la recueille et la verse à nouveau dans la chaudière. Besogne lente, peu fatigante, mais combien efficace !

Tableau d'Eugène Damas (1844-1899)
Tableau d'Eugène Damas (1844-1899)

Troisième jour

Le linge est rincé à grande eau et mis à sécher sur les fils tendus dans le verger, sur les haies et les buissons.

Mais quand la mère Gérard meurt en 1910, se répand l'usage des lessiveuses et c'en fut fini de la règle de trois...